'Ne serait-ce qu'une fois hélas Ne serait-ce qu'un instant fugace Aurais-je su toucher 'La Grâce' ? Aurais-je su toucher les gens Autant que ceux qui m'ont touché ?
Trouver la part d'humanité qu'on a tous indifféremment'
Ces mots resteront les derniers que vous entendrez à jamais sur un 'disque' d'Alain Chamfort.
Après L'IMPERMANENCE Alain Chamfort n'enregistrera plus d'album.
Et c'est lui qui en a décidé ainsi.
Ce n'est pas qu'il ne composera plus ni n'enregistrera plus. Mais sans doute plus un 'album'.
Point d'orgue à une carrière discographique démarrée il y a un peu plus de 50 ans, 'L'impermanence' ressemble à une œuvre majeure. Profonde. Poignante.
Quasi crépusculaire.
A l'instar des rares à l'avoir précédé sur ce vertigineux terrain (Léonard Cohen, David Bowie et Jacques Brel), Chamfort choisit ici de confronter sa création à notre inéluctable condition : cette 'impermanence en permanence', cette 'violence en permanence'.
Alain Chamfort va bien. Merci. Non, il n'est pas 'A l'aune' de son 'Apocalypse heureuse'. Il se trouve qu'il est 'simplement' un artiste d'une grande lucidité. D'une exigence rare.
Rare comme la place qu'il occupe désormais dans le paysage musical hexagonal. Rare comme ce disque dont la boussole apparaît sans conteste comme la volonté de clore une discographie 'En beauté'.
Interprète un peu malgré lui, ce compositeur d'exception a toujours inspiré les grands auteurs à travers les décennies. De Serge Gainsbourg à Pierre-Dominique Burgaud (dont l'écriture atteint ici des cimes peu fréquentées) en passant par Jacques Duval (qui signe avec 'Tout s'arrange à la fin' un retour inattendu), on est au fond en droit de se demander qui aura 'inspiré l'autre' ?
La question peut se poser tant il est clair que nous avons ici affaire à une vision !
Cet album est de la trempe de ceux qui comptent. Et pourraient 'rester'.
Alain et Pierre-Do l'ont porté pendant près de trois ans. Ils l'ont pensé, composé, écrit et voulu tel que vous l'entendez aujourd'hui.
A l'origine Benjamin Lebeau en a poséÌ les premiers jalons en façonnant 'Dans mes yeux' et 'L'apocalypse heureuse' (co-écrite avec Arnold Turboust).
Mais ce sont bien Johan Dalgaard (le plus parisien des claviéristes danois) et Julien Delfaud(ingénieur du son émérite), tous deux déjà présents sur 'Le désordre des choses', qui, avec Alain Chamfort lui- même constituent le noyau musical qui aura contribué à porter cette ambition au plus haut.
La liste est longue des collaborateurs sollicités parfois seulement pour quelques mesures, pour leurs inspirations libérées toujours : Para One, Régis Ceccarelli, Adrien Soleiman, Louis Delorme, Laurent Vernerey, Raphaël Chassin... Sébastien Tellier qui offre lui à cet album le désabusé 'Whisky Glace', fruit d'une collaboration dont on retrouve par ailleurs l'intégralité sur un EP qui paraîtra quelques semaines avant l'album.
Dans l'esprit d'Alain rien ne pouvait être trop beau pour cet ultime album.
Qui d'autre en effet qu'un artiste 'décideur' aurait assumé ce choix économiquement déraisonnable d'offrir à sept de ces chansons l'écrin de l'Ensemble à cordes Archipel que convoqua au mythique Studio Ferber Clément Ducol, cet arrangeur si prisé qui a libéré un emploi du temps impossible lui aussi pour 'l'amour de l'art'.
A l'heure où l'on est submergé par 'tant de quantité, si peu de Randy Newman' ('Vanité vanité'), Alain Chamfort livre ici un album tel un acte de courage, un pied de nez à l'époque.
Car ici, le moindre mot, la moindre note, le moindre son ne sont pas nés...
'Par inadvertance'
Marc Thonon
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