Chaque été, à Marseille, une bande de jeunes saute depuis les rochers, dans les calanques, ou du haut de la Corniche Kennedy qui domine la mer jusqu'à une dizaine de mètres, bravant l'interdiction des autorités et défiant le vide pour se sentir vivants. Cette attirance pour le saut, qu'ils savent être périlleux, n'est pas de l'insouciance. Ils se laissent tomber dans le vide pour vivre ces secondes où il n'y a plus aucune limite, où le corps ne se soumet plus à son propre poids, mais se fond dans l'espace, absorbé par la gravité, libre de tomber, de s'oublier. Le saut se pratique en groupe, il est une circulation entre le ciel et la terre encouragé par les cris. Et le silence qui précède le contact avec l'eau laisse entrevoir l'Éternité. C'est au prix du risque qu'ils sautent dans l'air puis dans la mer, devant les autres, comme un acte héroïque, un acte plus grand qu'eux.
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