Mêlant rageusement folklore hispanique, danse contemporaine et flamenco, Luz Arcas révolutionne la scène internationale avec Mariana : un imaginaire sur la femme comme bête de somme pour un corps jondo et cinq musiciens.
Si le flamenco est souvent résumé aux gestuelles festives et bouillonnantes, il s'avère pourtant qu'une source plus ancienne aux origines méconnues, le cante jondo – un ' chant profond ' (littéralement) – partage des accents beaucoup plus tragiques, où il est question de labeur, de labour, de détresse, de fièvre et de fureur. Luz Arcas a puisé dans cet univers brut pour créer une pièce singulière, d'une intensité quasi palpable. Le corps entravé de liens de cuir, de selles de bât, de couvertures tissées, elle incarne avec passion la jument, le cabri que les paysans protègent et maltraitent à la fois, comme dans les marianas (chants primitifs flamencos présents dans l'oeuvre). Accompagnée sur scène par ses musiciens, la performeuse devient, comme en plein rite, la chèvre qui suit le gitan errant, la mule du paysan, l'ânesse de l'azacán (porteur d'eau). Dans une chorégraphie ' aux aspects intuitifs, instinctifs et dionysiaques ', elle tisse avec douleur ce rapport ambigu, ambivalent, sur le fil, des hommes avec le corps des animaux femelles – et par extension, avec celui de la femme. ' C'est à cela que j'aspire avec ma danse : sublimer la défaite ', nous dit-elle. Un spectacle hors normes où se révèlent tout le talent et la sensibilité d'une artiste visionnaire, récompensé par le prix Godot 2023.
Ce spectacle est soutenu par l'Acción Cultural Española (AC/E) à travers le Programme pour l'Internationalisation de la Culture Espagnole (PICE).
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