Avec une allergie sévère à toute opposition sans nuance du bien et du mal, Gisèle Vienne poursuit son exploration des violences intrafamiliales. Sur scène, dans une scénographie saisissante, trois interprètes magnétiques, Adèle Haenel, Theo Livesey et Katia Petrowick, nous font vivre une expérience sensible et intense.
Un garçon sur dix, une fillette sur cinq, soit trois enfants par classe. C'est l'étendue systémique de l'inceste. La metteuse en scène et scénographe Gisèle Vienne s'empare du sujet avec son propre langage, attaque avec son arme à elle : le théâtre. Éprouver l'indicible aux côtés des concerné·es comme chemin le plus direct vers la prise de conscience. Sur une route la nuit, un frère et une sœur font durer la soirée dans la voiture. Blagueurs et décontractés, ils enchaînent les punchlines en s'enfilant des chips et tentent de mettre en voix leur trauma commun. Les esprits enfumés sont encore à la fête qu'il et elle viennent de quitter. Amplifiés par un décor sonore galactique de Caterina Barbieri, et par la fascinante architecture lumineuse d'Yves Godin, les gestes en slow motion se prolongent dans une éternité gélatineuse. Extra Life progresse dans un espace-temps apte à déployer jusqu'à l'extrême la sensation de durée propre aux survivant·es, célèbres ou anonymes. Voici leur expérience transfigurée, eux qui ont défié la nuit pour regagner la lumière
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