Tout commence par la rencontre de ce collectif d'artistes anversois avec un certain Friedrich Mohr, qui fut régisseur de l'Orchestre Philharmonique de Berlin. Nous remontons avec lui dans ses souvenirs. Printemps 1945, les troupes soviétiques s'apprêtent à envahir Berlin, déjà dévastée par les bombardements alliés…
Les musiciens de la célèbre phalange allemande imaginent un chant du cygne : jouer La Mort de Siegfried, extrait du Crépuscule des dieux de Wagner, et diffuser le concert en direct à la radio, interprété depuis six bunkers différents, éparpillés dans les ruines, où les instrumentistes et le chef ont trouvé refuge. Ce défi technique reviendra donc à Friedrich Mohr. Au crépuscule de son existence, le vieux monsieur accepte ici d'évoquer cet épisode incroyable.
Le Collectif Berlin, compagnie belge reconnue dans le monde entier pour ses spectacles à la lisière du documentaire et de la fiction, mais aussi du théâtre et de la vidéo, innove encore en brouillant toujours plus les frontières, jusqu'à l'apothéose. En lui donnant la parole, le collectif offre au régisseur l'occasion de réparer sa lâcheté d'alors, lui qui, ni nazi, ni résistant, ne défendit pas ses amis musiciens juifs exclus de l'orchestre.
Le récit de Friedrich Mohr se révèle inouï, rocambolesque, poignant. Et plein de rebondissements, jusqu'à la dernière minute. Le Collectif Berlin tisse au final une diabolique sarabande, qui nous met la tête à l'envers. Car, au fond, est-ce que la vérité de la fiction n'est pas plus juste que celle de la réalité ?
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