Attachée aux arts décoratifs, au motif, à toutes les formes d'art, c'est dans le cadre d'une grande installation in situ qu'Anne Bourse déploie son univers graphique et textile.
Quotidienne et compulsive, la pratique élargie du dessin qu'élabore Anne Bourse (1982, Lyon) prolifère sur de multiples supports et à différentes échelles. Exécutés au stylo à bille, aux feutres et à l'encre, ses traits serrés, ses motifs répétitifs, ses aplats de couleur et autres patterns de taches ornent divers papiers, se déploient dans des maquettes ou envahissent intégralement la surface de tissus et d'objets domestiques faits main. Dans ses expositions, elle compose de la sorte des environnements englobants, à l'atmosphère intime et onirique, où prédomine une palette caractéristique aux tons rose, violet, bleu et vert. Le vocabulaire graphique d'Anne Bourse dégage une forte tension entre la spontanéité de représentations maladroites et la lente construction d'enchevêtrements sophistiqués. Il se place sous les auspices stylistiques d'illustres créatrices : les dessins médiumniques à profusion ornementale de Madge Gill, les patterns moirés de l'Op art de Bridget Riley, les écheveaux de lignes tracés par Louise Bourgeois, les complexes réseaux géométriques d'Emma Kunz obtenus par radiesthésie… Les griffonnages de l'artiste sont comme des débordements graphiques qui relèveraient d'une écriture automatique, des tracés instinctifs répondant à l'impulsion. D'autres dessins sont au contraire le fruit d'un travail de longue haleine par le patient recouvrement d'un dense tissu de lignes colorées ondoyantes. Ces arabesques abstraites, dansantes et psychédéliques, évoquent des motifs végétaux ou ceux de textiles. Le flux continu des traits dessinés tient là encore d'errances graphiques, proches d'un état d'hypnose. Lauréate de la 11e édition du Prix des Partenaires du MAMC+ dédié aux arts graphiques, Anne Bourse a conçu, pour sa première exposition personnelle dans un musée en France, un ensemble de nouvelles œuvres. Sous l'intitulé ' Nuits ', elle invente un monde aux marges de la fiction, habité par une chambre de gardien, au milieu de maquettes, de bancs et d'étagères de display. Dans cet espace de projection mentale, teinté de mélancolie, s'entrecroisent des sentiments opposés d'intimité et d'éloignement. À l'instar d'une conteuse, Anne Bourse entretisse ses histoires et ses créations. Avec ses tissages aux fils dorés et argentés, elle fait écho à la tradition industrielle de la rubanerie stéphanoise, mais souligne surtout l'analogie centrale dans sa démarche entre trame textile et ligne dessinée.
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