Le chorégraphe américain Trajal Harrell a plusieurs amours : pour la scène ballroom et le voguing, pour l'art dramatique et la danse post-moderne, autant de sources qui irriguent son écriture depuis la flamboyante trilogie Twenty Looks or Paris Is Burning at the Judson Church . Maggie the Cat ouvre un nouveau chapitre, où brille une composition de groupe en forme de mutinerie domestique et politique.
Au départ, la Maggie du titre fait référence à un personnage emblématique de La chatte sur un toit brûlant, pièce de Tennessee Williams créée à Broadway en 1955. L'histoire se passe dans le sud des États-Unis et fait état d'une famille blanche en crise dont le patriarche, Big Daddy, est malade. Au second plan, les domestiques afro-américain·e·s servent et habitent à peine les lieux. Trajal Harrell leur fait de la place et crée un défilé pour mettre en lumière leurs corps et leurs voix. Sur un catwalk les danseur·euse·s paradent, muni·e·s d'accessoires de la maison détournés en création de mode : oreillers, draps, nappes deviennent drapés et coiffes, matières d'un renversement des rôles. Le moteur vibrant du voguing est ici au cœur de la vitalité créative, il permet la réappropriation par la danse et la mise en scène de soi de codes établis par la classe dominante, blanche, bourgeoise et argentée. Dans une douceur de tempo caractéristique de son univers, Trajal Harrell nous invite à prendre part à cette cérémonie ample, qui retourne tranquillement mais sûrement les rouages de la situation.
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