Cette pièce, composée comme un trio entre la danse, le son et la lumière, porte une recherche archéologique et sonore du mouvement. La chorégraphe poursuit son obsession pour les corps qui martèlent, qui entrent en résonance, en vibration, en dialogue avec les pulsations de la musique électro-acoustique et modulaire jouée en direct.
Seule en scène, Aina Alegre convoque la mémoire physique et sonore d'un geste ancien, le martèlement, dont elle explore tous les possibles. La chorégraphe espagnole a conçu R-A-U-X-A comme un dialogue entre danse, son et lumière, où le corps entre en vibration et devient pulsation. Elle en révèle la présence dans sa propre mémoire corporelle mais ouvre sa recherche à d'autres mémoires et pratiques : le martèlement, c'est à la fois certaines danses traditionnelles, les claquettes, le flamenco ou la house mais aussi un geste de labeur ou de rituel. Il évoque des formes primitives de musique et de communication mais contient aussi une technicité particulière. Aina Alegre en conçoit une danse profondément hybride et nuancée, où le corps produit du son et du rythme, qui entrent en résonance avec la partition électronique de Josep Tutusaus. R-A-U-X-A dessine ainsi une série de paysages et de situations sonores, où dialoguent le mouvement, le son produit par le corps et le son des machines. Avec cette pièce, Aina Alegre poursuit un travail entamé voilà plus de quinze ans, qui s'intéresse aux imaginaires autour du corps ainsi qu'aux notions de mémoire et d'anthropologie du geste. Son écriture chorégraphique est étroitement liée au rythme et à la musique. L'observation du martellement est ainsi souvent revenue au fil de pièces très différentes, comme Le Jour de la Bête en 2017, où les interprètes portaient des chaussures métallisées pour frapper un sol couvert de terre et créer une polyrythmie.
Vincent Théval
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